Télétravail transfrontalier Suisse – France: mode d’emploi à la mi-2025
A la fin du premier trimestre 2025, le canton de Genève emploie quelque 115 000 frontaliers, soit près d’un actif sur trois dans le canton; un nouveau record qui traduit l’essor — et l’attrait — du télétravail entre les deux rives du Léman.
Depuis décembre 2022, un régime spécial permet en effet aux salariés domiciliés en France de travailler à distance jusqu’à 40% de leur temps annuel sans déplacer leur lieu d’imposition. Maintenu fin 2024, cet accord garantit encore la même souplesse jusqu’au 31 décembre 2025.
«Beaucoup de dirigeants ignorent que le plafond fiscal de 40% diffère du seuil social de 50%. Pour éviter les rappels d’impôts ou de cotisations, il faut piloter deux compteurs distincts et demander l’attestation A1 dès qu’un collaborateur prévoit un télétravail régulier», avertit Romain Prieur, expert-comptable diplômé et fondateur de la Fiduciaire Karpeo à Genève.
Un cadre provisoire prolongé, une solution durable en préparation
Le Secrétariat d’Etat aux questions financières internationales et le ministère français des Finances ont prorogé le dispositif transitoire jusqu’à fin 2025, le temps de finaliser l’avenant signé le 27 juin 2023 qui doit inscrire la règle des 40% dans la convention fiscale franco-suisse. Le Sénat français l’a adopté le 3 avril 2025; le texte attend désormais le vote de l’Assemblée nationale, attendu à l’automne, avant notification mutuelle et probable entrée en vigueur le 1ᵉʳ janvier 2026.
Ce que signifie concrètement la «règle des 40%»
Le plafond s’apprécie par année civile: 40% des heures travaillées ou 96 jours ouvrés au maximum. Sont comptabilisés tous les jours d’activité effectués depuis la France, y compris les missions temporaires ou les périodes de formation en visio.
Dépasser cette limite oblige l’employeur genevois à calculer la quote-part de salaire rattachée à la France, à prélever l’impôt français à la source et à transmettre des données salariales détaillées — un casse-tête administratif que la plupart des PME préfèrent éviter.
(Licence Unsplash @mikeyharris)
Assurance sociale: une logique distincte à 50%
Sur le plan des cotisations, la Suisse et la France appliquent l’accord-cadre multilatéral entré en vigueur le 1ᵉʳ juillet 2023: tant que le télétravail reste au-dessous de 49,9%, le salarié demeure affilié à l’AVS suisse.
Au-delà, il bascule à la Sécurité sociale française si aucune dérogation n’est obtenue. D’où la nécessité pour l’employeur de solliciter l’attestation A1 avant de franchir le seuil social.
Bonnes pratiques pour 2025
Maintenir un journal mensuel des jours télétravaillés, automatiser les alertes dans le SIRH et rappeler dans chaque contrat la double limite 40% fiscal / 50% social constituent le trio gagnant.
Les employeurs gagneront aussi à déposer la demande A1 dès qu’un collaborateur prévoit plus de 20% de home-office régulier; le délai de délivrance peut dépasser un mois en période de forte affluence. Côté salariés, conserver les justificatifs de frais (connexion, électricité, mobilier) permet d’optimiser la déclaration française sans risque de doublon avec l’imposition suisse.
Le calendrier à surveiller
- 30 juin 2025: mi-parcours idéal pour s’assurer que le quota de 40% n’est pas déjà atteint.
- Automne 2025: examen du projet de loi par l’Assemblée nationale; en cas d’adoption, notification mutuelle avec Berne et entrée en vigueur possible au 1ᵉʳ janvier 2026.
- 31 décembre 2025: fin du régime transitoire. Sans ratification, les deux Etats devraient renégocier d’urgence, mais les observateurs s’attendent à une confirmation du dispositif actuel.
En conclusion
Pour 2025, frontaliers et employeurs peuvent encore compter sur la souplesse des 40%. Mais la surveillance des seuils, la bonne ventilation des frais et la coordination entre paie et RH restent indispensables: un simple dépassement non déclaré suffit à déclencher un redressement côté fiscal ou social.
Les entreprises romandes qui veulent sécuriser leur dispositif trouveront, chez Karpeo, une fiduciaire genevoise rompue au dossier transfrontalier… et aux subtilités des deux législations.